Spectacle écrit par Sarah Marcuse, mis en scène par Sarah Marcuse et Madeleine Raykov, joué par Sarah Marcuse.
Sarah Marcuse n'est pas la première, hélas, a raconté "son" inceste. A l'ère de "Me too", les langues se sont déliées et chacun, mais le plus souvent chacune, expose à sa façon ce qui était jadis caché.
A sa façon, cela veut dire le plus souvent avec difficulté et douleur, et à l'issue d'un discours qui emprunte un chemin escarpé plein d'horreurs et de malheurs. Elle va ainsi se replonger dans une mémoire cadenassée qui voulait oublier ou enfuir ce que les adultes, les parents, les hommes sont capables de faire aux enfants.
C'est forcément par la parole, une parole ponctuée d' "holyshit !", juron qu'on aurait préféré "francophone", mais l'auteure-actrice est née à Taïwan, que Sarah Marcuse va se libérer en direct de tout ce qu'elle a trop longtemps retenu. D'abord prostrée au milieu d'un tas de livres, censés la libérer mais n'étant qu'une première étape vers une possible libération, puis manipulant sur une structure en bois des petits objets, des "fétiches" faisant allusion aux personnages qui ont pourri ces premières années et l'ont lancé dans la vie avec une ombre opaque sur le corps et le cœur.
Il faut être attentif à cette parole qui peut se perdre parfois dans des sentiers labyrinthiques avant de reprendre une voie plus royale : celle où elle atteindra les portes de la délivrance. Chanteuse et actrice, artiste totale, Sarah Marcuse avec Madeleine Raykov, sa co-metteure en scène, "chorégraphie" avec délicatesse ce parcours où elle défie tout ce qui la ravageait. Métaphoriquement, elle se couvre d'une couronne touffue de végétal. On pourra y lire la preuve possible de son succès sur l'adversité avec des lauriers à la façon "holyshit !".
Jamais Sarah ne se leurre et ce qu'elle montre, elle en sait le prix. Ce n'est pas une victoire, mais un partage avec celles et ceux, malheureusement très et trop nombreuses et nombreux d'après les statistiques, qui ont connu dans leurs vies précoces des "aigles noirs aux ailes déployées".
Signe d'un triomphe modeste mais réel, elle achèvera ce voyage terrible mais captivant par le plus beau petit mot de la langue.
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